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Assainissement des eaux : Réforme du financement dans le viseur

Marc Radler
Posté le 06/05/2013
Articles de fond

A Genève, les infrastructures d’assainissement des eaux font partie soit du réseau primaire, propriété des SIG, soit du réseau secondaire, propriété des communes. Actuellement, leur financement fait appel à un mélange de taxes payées par l’utilisateur et de dépenses publiques générales. Ainsi, une partie du financement du réseau secondaire est assuré par le produit de l’impôt communal, ce qui déroge au principe de l’utilisateur-payeur tel que prévu par la législation fédérale. En décembre 2012, le Conseil d’Etat a présenté un projet de modification en profondeur du financement de l’assainissement des eaux (PL 11086).

 

Le nouveau mode de financement
Le Conseil d’Etat prévoit pour le réseau primaire un réaménagement du régime de la taxe d’épuration existante couplée à une hausse de tarif, qu’il justifie par le fait que les recettes actuelles ne permettent pas de couvrir les coûts. Pour le réseau secondaire, la taxe d'écoulement actuelle sera remplacée par une nouvelle taxe annuelle d'utilisation du réseau et une taxe unique de raccordement due lors de la construction. Il n’y aurait donc plus de financement via l’impôt. Enfin, le projet du Conseil d’Etat prévoit la création d’un fonds intercommunal d’assainissement qui mutualiserait les coûts d’entretien du réseau secondaire et les répartirait sur l’ensemble des communes. Ceci permettrait notamment une uniformisation de la taxe.

 

Un objectif environnemental
En parallèle, le Conseil d’Etat souhaite donner un caractère écologique à la nouvelle loi. Un mécanisme incitatif s’appliquerait donc à la taxe unique de raccordement, visant à lutter contre l’imperméabilisation des sols lors de la construction. La loi prévoit ainsi des abattements potentiels, la possibilité d’en profiter étant dépendante du degré de non-imperméabilisation des sols ou encore de la mise en place d’une gestion des eaux à la parcelle.

 

Le point de vue de la CCIG
La CCIG prend acte de la volonté du Conseil d’Etat d’adapter la pratique cantonale à la législation fédérale. De même, la volonté de mutualiser les coûts et, partant, d’aplanir le montant des taxes entre communes semble justifiée sur un territoire cantonal de taille réduite. Cependant, au-delà de ces quelques éléments positifs, le projet du Conseil d’Etat suscite le scepticisme pour un certain nombre de raisons, détaillées ci-dessous.

 

Hausse des charges supportables ?
Pour le consommateur final, la conséquence principale serait une hausse de charges. Pour les entreprises, la situation n’est malheureusement pas claire, les estimations du Conseil d’Etat étant très réductrices et ne couvrant pas la grande diversité des profils composant le tissu économique du canton. La logique incitative du projet implique que les entreprises ayant des besoins importants en termes de surface construite seraient proportionnellement davantage affectées.

 

La CCIG s’alarme en particulier du fait que, si le Conseil d’Etat prévoit une hausse relativement modérée des taxes lors de l’entrée en vigueur de la loi, celle-ci prévoit la possibilité de tarifs beaucoup plus élevés à terme. Les hausses sont donc potentiellement très importantes.

 

Il importera donc de veiller à ce que la hausse des coûts soit supportable. En particulier, il faudra veiller à ce que le régime futur conserve des possibilités d’exonérations partielles pour certaines entreprises, sur le modèle de ce qui est prévu par la législation actuelle. Les entreprises artisanales ou industrielles peuvent en effet bénéficier d’un abattement de la taxe annuelle d’épuration si celle-ci constitue une charge financière disproportionnée.

 

Une logique politique plus qu’économique
Si la lutte contre l’imperméabilisation des sols est louable en soi, il s’agit là d’un objectif sous-tendu davantage par une logique politique qu’économique. Il conviendrait en conséquence que l’aspect incitatif des nouveaux tarifs prenne uniquement la forme d’abattements possibles et non de majorations artificielles des taxes standards. Malheureusement, le projet de loi reste très évasif sur ce point.

 

Une hausse d’impôts déguisée
La CCIG est particulièrement critique quant au fait que cette loi prévoit un transfert de charge des communes aux contribuables sans aucune contrepartie. Les coûts devant être entièrement assumés par l’utilisateur et non plus par le budget des communes, la logique voudrait que celui-ci bénéficie d’une baisse proportionnelle de la fiscalité. Or, ce projet de loi ne prévoit aucune contrepartie de la sorte. Il s’apparente donc à une hausse d’impôts en tout sauf en nom. Le Conseil d’Etat se cache derrière l’arbre – opportun – de l’autonomie fiscale des communes, tout en admettant que les baisses de la fiscalité sont peu probables. Cette manière de faire est inacceptable et la CCIG invite instamment le Conseil d’Etat à réfléchir à un moyen alternatif de faire en sorte que son projet ne se traduise pas par une hausse détournée de la fiscalité. La fiscalité immobilière étant très lourde à Genève, ce ne sont pas les possibilités qui manquent.

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