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L’aéroport doit se réinventer, et non être bridé !

CCIG
Posté le 14/10/2019
Articles de fond

Le 24 novembre prochain, les électeurs genevois seront amenés à se prononcer sur l’initiative 163 « Pour un pilotage démocratique de l’aéroport de Genève », ainsi que sur le contreprojet présenté par le Grand Conseil. Il s’agit ici d’exposer pourquoi la CCIG appelle à refuser l’initiative et accepter le contreprojet.

Quelle est la mission de Genève Aéroport (GA) ? Le gouvernement fédéral la fixe en ces termes : « Il est voué avant tout au trafic aérien européen et aux vols intercontinentaux répondant aux nécessités régionales[1]. » Plus précisément, cela signifie que l’aéroport doit servir trois publics : la Genève internationale, l’économie et le tourisme.

Concernant le premier de ces publics, l’ambassadeur Valentin Zellweger, représentant permanent de la Suisse auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève, a déclaré que « Sans l’aéroport ou avec une aéroport de taille réduite, la Genève internationale ne se développerait pas, ou alors son futur poserait un problème majeur car d’autres villes reprendraient la place de Genève[2]. » Au sujet de l’économie, un sondage[3] de la CCIG auprès de ses membres montre que plus de deux tiers des répondants ont souligné l’importance de GA pour eux. On peut donc dire que l’aéroport remplit sa mission et qu’il le fait en répondant à la demande finale, les voyageurs, telle qu’elle est détectée par les compagnies aériennes.

Il vaut la peine de souligner que GA ne reçoit aucun subside de la part de l’État et qu’il remplit sa mission avec ses propres moyens, dégageant qui plus est un bénéfice de 85 millions de francs en 2018, dont la moitié a été redistribuée au canton.

Des questions intéressantes mais des réponses inadéquates

L’IN 163 n’est pas dénuée d’intérêt. Elle pose deux postulats : premièrement que Genève Aéroport devrait dépendre du Grand Conseil et non plus du Conseil d’État ; deuxièmement que les objectifs de développement durable devraient devenir prioritaires sur ceux de la gestion de GA. 

Avec le premier postulat, les auteurs de l’initiative admettent souhaiter que la politique prenne le pas sur l’économie dans la gestion de Genève Aéroport. Sans détailler les conséquences d’un tel changement, on peut affirmer que soumettre la gestion d’une entreprise comme GA, qui doit avoir la souplesse de réaction du temps court de l’économie, n’est pas sans risque. Le temps long de la réflexion politique, qui est nécessaire à un bon fonctionnement de la démocratie, ne permet pas d’adapter assez vite les outils qu’offre l’aéroport à la demande de sa clientèle finale.

Par ailleurs, GA est tout sauf une entreprise privée qui agirait en dehors du contrôle démocratique. Jugeons plutôt. Le premier niveau de contrôle se situe au niveau fédéral. L’Office Fédéral de l’Aviation Civile (OFAC) et la fiche du Plan sectoriel de l’infrastructure aéronautique (PSIA) validée par le Conseil fédéral donnent les cautèles et les objectifs auxquels doivent se soumettre l’aéroport.

Le Conseil d’État agit quant à lui à travers plusieurs vecteurs. Tout d’abord, il est l’interlocuteur privilégié de GA. Annuellement, il reçoit un rapport d’activité de l’aéroport et soumet un rapport au Grand Conseil pour approbation. D’autre part, il conclut tous les cinq ans une convention d’objectifs[4] qui définit précisément le cadre de la gestion de l’aéroport. Y sont inclus notamment des objectifs concernant la collaboration avec les communes, les horaires d’exploitation, la gestion des nuisances et du bruit, le développement durable, l’accessibilité terrestre de l’aéroport, l’environnement social les investissements. La liste n’est pas exhaustive, mais elle est évocatrice de l’étendue de cette convention.

La Direction de l’aéroport de Genève, quant à elle, est coiffée par un Conseil d’administration de 21 membres composé de personnes de diverses provenances : les sept partis du Grand Conseil ont un représentant, le Conseil d’Etat en a six, les communes voisines deux, auxquels on doit ajouter deux représentants de la Suisse occidentale, un des départements français limitrophes et trois du personnel. Personne n’est oublié ; chacun peut faire valoir son point de vue.

A la lecture des contraintes auxquelles est déjà soumis Genève Aéroport, on imagine facilement que ce n’est pas en rajoutant un intervenant – qui plus est un acteur aussi imprévisible que le Grand Conseil – que l’on améliorera la situation.

Contreprojet : un trait d’union

Le contreprojet à l’IN 163 construit sur la situation existante en agissant sur deux axes : la continuité institutionnelle et l’équilibre entre les contraintes économiques, sociales et environnementales. En maintenant la dépendance de l’aéroport vis-à-vis du Conseil d’État, le contreprojet arrime GA à un interlocuteur qui vit au même rythme que lui. Ceci permet ainsi d’espérer qu’un dialogue continu puisse être entretenu et que les ajustements liés à la gestion d’une entreprise d’une telle importance soient pris au rythme nécessaire.

L’équilibre proposé par les auteurs du contreprojet repose sur un axiome simple : le développement durable repose à la fois sur les aspects écologiques, sociaux et économiques. C’est en harmonisant ces trois domaines que l’on peut construire un futur à long terme. Un aéroport qui n’aurait plus assez de clients parce qu’il aurait privilégié uniquement les impératifs écologiques et sociaux, ne remplirait plus sa mission de desserte aérienne. D’autre part, il obérerait durablement ses chances de survie.

Voter utile

Le choix de ce scrutin est donc soit de compliquer la tâche de l’aéroport pour lui faire accomplir des missions qu’il assure déjà, soit de bâtir sur l’existant. Il convient de rappeler que les priorités de GA vont déjà aujourd’hui vers la diminution de son empreinte écologique et sonore, à égalité avec sa santé économique et sa responsabilité sociale.

Compte tenu enfin de l’importance de la desserte aéronautique pour la Genève internationale et pour les entreprises de la région, il s’agit de faire attention à ce que les changements qu’on apporte à la gouvernance de l’aéroport ne soient pas trop sources de bouleversements, de peur de déséquilibrer un système complexe.

En conséquence, la CCIG appelle à voter NON à l’IN163 et OUI au contreprojet. 


 

[1] Plan sectoriel de l’infrastructure aéronautique, partie III C, fiche d’objet aéroport de Genève, p. 13

[2] Audition de M. l’Ambassadeur Zellweger devant la commission de l’économie du Grand Conseil de Genève

[3] Enquête conjoncturelle de la CCIG, printemps 2017

[4] https://www.ge.ch/document/convention-objectifs-entre-republique-canton-geneve-aeroport-international-geneve

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