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Quarantaine : Une dérogation possible pour les travailleurs frontaliers

Morgan Tinguely
Posté le 26/08/2020
Opinions

Avec 63 cas cumulés sur les 14 derniers jours pour 100 000 habitants, la France dépasse la limite fixée par l’OFSP et est théoriquement un pays à risque en date du 25 août. Cette mise sur « liste rouge », si elle est déclarée par l’OFSP, signifie que les voyageurs en provenance de la France sont soumis à une quarantaine obligatoire lors de leur arrivée en Suisse. Toutefois, des exceptions restent possibles pour les quelque 125 000 travailleurs frontaliers de la région lémanique.

Bien que l’Union européenne souhaite harmoniser les critères de qualification des zones et pays à risque, force est de constater que tel n’est pas encore le cas. La Suisse a donc défini ses propres critères qualifiant « à risque » les pays franchissant le cap des 60 cas cumulés sur les 14 derniers jours pour 100 000 habitants. Depuis la mise en place de ce critère, la liste des pays à risque ne cesse de s’allonger, atteignant 53 pays à ce jour. Le Conseil fédéral, sur la base de la loi sur les épidémies, a édicté l’ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus dans le domaine du transport international de voyageurs. Cette ordonnance vise à empêcher la propagation transfrontalière de la Covid-19 et fixe le cadre de la quarantaine et ses critères, mais elle prévoit également les dérogations à cette quarantaine.

Dérogation pour les frontaliers

L’article 4 de l’ordonnance, prévoit – au moment d’écrire ces lignes – diverses dérogations, dont une est particulièrement importante pour les cantons partageant une frontière avec les pays voisins. En effet, l’exemption de la quarantaine est possible pour les personnes « qui, pour des motifs professionnels ou médicaux impérieux sans possibilité d’ajournement, entrent en Suisse quotidiennement ou pour un maximum de 5 jours ». Selon le rapport explicatif de l’ordonnance, publié par l’OFSP, les travailleurs frontaliers entrent dans l’application de cette disposition. Le rapport est d’ailleurs sans équivoque puisqu’il affirme que la « dérogation […] s’applique aux frontaliers : elle vaut également pour les frontaliers actifs à temps partiel, qui par exemple ne travaillent qu’un seul jour par semaine ».

L’utilisation des formules « motifs impérieux » et « sans possibilité d’ajournement » dans cette ordonnance introduit, tout de même, une incertitude quant à leur lien avec un motif professionnel, de sorte qu’une clarification officielle s’avère nécessaire. En attendant, deux éléments plaident pour une interprétation qui va dans ce sens.

En premier lieu, la France, dans le courant du mois de mai, avait – pour justifier les déplacements à plus de 100 km de son domicile – aussi introduit la notion de motifs impérieux, sans en donner une définition juridique. Par conséquent, la pratique a dû apporter les précisions nécessaires. En matière professionnelle, un motif impérieux était « aisément justifiable par un contrat de travail, une fiche de paie, une convention de stage ou une attestation d’un employeur » selon Me Roland Perez, avocat et chroniqueur auprès d’Europe 1.

En second lieu, selon le rapport explicatif de l’ordonnance, les dérogations visent des personnes qui, à l’image des frontaliers, ne sont que brièvement exposées à un risque d’infection à l’étranger, en l’occurrence en France pour les frontaliers y résidant.

Les plus de 125 000 travailleurs frontaliers de la région lémanique, dont 87 000 pour le seul canton de Genève, représentent une force de travail vitale pour l’économie, et particulièrement pour les commerces, la restauration et l’industrie. Ils devraient, ainsi, pouvoir continuer à se rendre sans entrave excessive sur leur lieu de travail. Afin d’obtenir une solution pragmatique, les autorités devraient recommander une limitation des déplacements transfrontaliers, tous motifs confondus, et encourager le télétravail lorsque cela est possible, tout en garantissant un passage fluide de la frontière pour les travailleurs dont la présence physique est requise.

Pour les autres cas, les cantons sont compétents 

L’ordonnance donne, en outre, aux cantons une large marge de manœuvre pour accorder d’autres dérogations ou allégements aux quarantaines. Tant des intérêts publics que privés prépondérants peuvent entrer en ligne de compte, selon le rapport explicatif de l’OFSP. Le revers de la médaille est que les cantons doivent veiller à ce que les personnes bénéficiant d’allègement ne contaminent pas d’autres personnes…

Ainsi, les cantons frontaliers ont en leurs mains une large marge d’appréciation leur permettant de tenir compte de cas particuliers. En ce sens, la CCIG, les milieux économiques ainsi que les entreprises au sens large souhaitent que lesdits cantons pondèrent et utilisent cette marge de manœuvre afin de trouver le meilleur équilibre entre la préservation du tissu économique et les impératifs sanitaires.

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