Covid : les aides vont-elles influer sur l’entrepreneuriat?
La création d’entreprises a été paradoxalement élevée l’an dernier en Suisse. Mais le nombre de faillites pourrait vite contrebalancer cette apparente vitalité économique.
46 842 nouvelles entreprises ont été enregistrées en Suisse en 2020, en progression de 5,3% sur un an. En transposant la part habituelle de 8% pour Genève, on peut estimer le chiffre cantonal à environ 3800. Pour janvier 2021, Bisnode D&B, spécialiste des données commerciales et financières, comptabilise 3727 créations d'entreprises, chiffre identique à celui de l’an dernier. Les entreprises en faillite ont, elles, été nettement moins nombreuses en 2020 que l’année d’avant. Toujours selon Bisnode, les faillites d'entreprises ont poursuivi leur repli en janvier en Suisse, de 23% sur un an.
Sans doute, les aides publiques accordées lors de la pandémie parviennent à maintenir les sociétés en difficulté à flot. Le repli était de 17% en décembre et de 19% sur l'année écoulée. Toutefois, les plus forts reculs sont enregistrés en Suisse orientale (- 43%), deux fois moins en Romandie (-22%). A cela s’ajoutent les nombreuses sociétés dites « zombies », définies par l'OCDE comme celles qui ne vivraient plus et qui auraient fait faillite si les taux d'intérêt n’étaient pas à un niveau assez bas pour rembourser les intérêts des emprunts.
Pour Creditreform, qui a également mené une étude spécifique, de telles données n’ont rien de particulièrement réjouissant. Mais il est difficile à ce stade de dire si l’évolution s’est faite malgré ou à cause de la pandémie. Selon le directeur de l’IREG (Institut de recherche appliquée en économie et gestion) Giovanni Ferro Luzzi, « iI y a peut-être un décalage entre la création de ces entreprises qui ont été planifiées et projetées en 2019 – qui était une période de bonne conjoncture – et mises sur pied en 2020 ‘malgré tout’. »
Les données récentes manquent à l’échelon local. Par comparaison, les créations d’entreprises ont connu en région Rhône-Alpes-Auvergne un repli en mars et avril 2020*, mais pas le reste de l’année. Ce fait est néanmoins difficile à attribuer à la pandémie, vu les délais nécessaires à la création d’une entreprise.
Si les aides ainsi que les indemnités permettent à la majorité des entreprises de conserver les emplois, Hervé Montfort, directeur de l’Office cantonal de la statistique de Genève, relève que « les aides étatiques ne font que retarder la faillite de certaines entreprises déjà vouées à disparaître. Même remarque pour le système administratif et judiciaire ralenti, qui ne fait que repousser un processus inéluctable.»
Pour beaucoup d’experts, le nombre de faillites risque donc d’exploser ce printemps, après la fin des apports publics. A ces annonces tardives s’ajouteront les faillites des sociétés insolvables en raison de la conjoncture, avec à la clé une hausse regrettable du chômage.
D’après une analyse de l’Office fédéral de la statistique portant sur les années 2013 à 2018, une entreprise suisse sur deux disparaît avant son 5e anniversaire. Cela prouve que, avant même la pandémie, la lutte pour la survie des primo-entreprises est constante et difficile. Celles qui ont le plus de chances de survie sont actives dans la santé, celles qui en ont le moins se situent dans l’hôtellerie-restauration. La pandémie ne fera qu’en creuser l’écart.
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